6 déc. 2011

Bon Iver au Métropolis

J’ai parfois de la difficulté à trouver mes mots, ce qui peut s’avérer très compliqué quand on écrit. C’est comme de demander à un muet de crier ou à un aveugle de décrire ce qu’il voit. Et pourtant dans ces deux derniers cas, c’est tout de même possible. Le muet émettra un son et l’aveugle imaginera une scène. Tout ça pour dire que je vais arriver au bout de cette chronique, même si les mots me manquent pour décrire l’expérience vécue hier soir. Justine Vernon va me faire passer un bon hiver.
Passons sur la première partie (ah le choix difficile de la première partie), une charmante jeune femme à la voix sensuelle, dont le talent à la guitare rivalisait avec la longueur de ses interventions entre chaque pièce. La qualité ne fait pas forcément l’émotion, et j’avoue m’être ennuyée, voir agacée de l’éternelle explication de la prochaine peine d’amour mise en musique en trois accords. J’ai alors compris pourquoi, pour la première fois de ma vie à un concert, nous avions reçu un petit papier indiquant notre absolu silence requis pendant le show. Difficile de tenir sa langue quand on s’ennuie…

Bon Iver arrive enfin, pas à trois mais à neuf musiciens. Rien que ça ! On sent avant même les premières notes que l’on va assister à quelque chose de grandiose. Et ce fût le cas. Il y a chez Bon Iver quelque chose de très spirituel, comme si le concert se transformait en cérémonie pour célébrer une musique vibrante et organique. Les énergies des uns et des autres ont comme fusionné, communié pour rendre l’air électrique, entre mélange de douceur et de vitalité. Comme une renaissance. En fait, chaque toune est un véritablement accouchement avec de la douleur, des cris, de la fébrilité, et au final, une création unique qui sortie des trippes des musiciens va vivre pour longtemps. C’est le genre de musique qui ne vieillira pas, mais qui évoluera.

Je pourrais vous faire une montagne de descriptions des arrangements, et vous dresser la liste exhaustive du concert, que vous n’auriez même pas l’ombre de la sensation de ce qui s’est passé là-bas hier soir. En écoutant ça, je me disais : ce que j’aime cette musique. C’est comme de tomber en amour de quelqu’un qu’on voit tous les jours. À force de l’écouter, on a tellement pris l’habitude qu’on ne sait plus pourquoi on aime. Et un jour, on a une révélation. Nos oreilles ont su lâcher prise et découvrir que derrière les mots, la mélodie, il n’y a pas que du sens, il y a surtout de la sensation. Et ça ne se comprend pas, ça se vit juste. Mes frissons ne sont toujours pas redescendus du rappel avec Skinny Love et The Wolves (Act I and II), j’en garde des séquelles et heureusement l’hiver me les gardera bien gelées.

Voilà pourquoi, parfois, je suis frustrée de devoir écrire ici, car en me relisant, je trouve ça bien fade par rapport au vécu de la situation. L’intensité ne sera jamais la même, car disséquée, elle devient « l’un temps cité » et pas réitéré. J’aurais voulu faire cette chronique en n’y mettant que des points de suspensions, le lecteur aurait alors eu toutes les interrogations nécessaires à ces trois petits points qu’il l’aurait conduit à penser que la traduction d’un événement en mots est suicidaire mais parfois nécessaire et dans mon cas, malheureusement vitale.

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